Elle porte plainte
Les débats du conseil municipal sont publics, c’est prévu par la loi. Mais à Calzan, le maire édicte lui-même les décrets d’application. De manière très personnelle.
« S i elle avait été un homme, je lui aurais mis trois ou quatre cataplasmes et un coup de godasse où il faut ! »
L’œil goguenard et le verbe fleuri, Gérard Sabatier, 75 printemps, s’en amuse encore. Dans l’unique et petite pièce qui depuis trois décennies tient lieu de mairie, entre un buste de Marianne « relookée » par un administré d’origine belge et le portrait intact d’un Jacques Chirac droit comme un « i » dans son costume de Président de la République, l’édile chafouin sautille comme il le faisait jadis lorsque, commando para, il s’échauffait avant de s’adonner au cross combat, qu’il maîtrisait comme personne. Sous sa casquette à la gavroche, il plaisante comme un gamin depuis que Geneviève Romher, « une étrangère au village », coprésidente de l’association Vent contre nature, a déposé plainte contre lui le 19 novembre, en gendarmerie de Varilhes, avec missive explicative au préfet de l’Ariège !
Le coup de sang de l’élu
La veille au soir, cette dernière voulant assister au conseil municipal, le premier magistrat de la petite commune lui soufflait dans les oreilles une version un peu musclée de « va t’en voir ailleurs si j’y suis », en patois dans le texte. Refus de l’intéressée et coup de sang de l’élu. Montée dans les tours, tutoiement et, selon les dires de madame, « tenue de propos infamants et injurieux » à son endroit… Pas impressionnée pour autant, Mme Romher, « l’hurluberlue soixante-huitarde », comme la qualifie avec délectation Gérard Sabatier, persistera dans sa volonté d’assister à la réunion et demandera « à ce que les lois de la République soient respectées ». Réponse prêtée à l’édile : « Je suis ici chez moi, je fais ce que je veux, et toi, tu dégages ! » L’inscription à l’ordre du jour d’un projet d’implantation éolien sur le col de Calzan initié par la société Opale motivait la présence militante et contradictoire de Mme Geneviève Romher, accompagnée de Mme Brigitte Charles-Domine.
« Oui, c’est vrai, j’assume ! J’ai refusé l’accès au conseil municipal à ces deux femmes. J’ai vu ces hurluberlues débouler comme des furies dans la mairie. D’abord, c’est bien gentil, mais on se présente. Moi, je suis d’une époque où quand on voulait prendre la parole, à l’école ou avec les parents, on levait le doigt et on demandait la permission avec respect. Pas en prenant les gens de haut et en se retranchant ensuite derrière de grands principes. »
Le prochain conseil, je le ferai à huis clos !
Et de poursuivre : « Alors, elle m’a dit que le conseil municipal était public, que nous étions en démocratie et que des gens avaient donné leur vie pour la démocratie. Moi, j’ai pas de leçons à recevoir. J’ai été commando para en Algérie, en Égypte et en Israël. J’ai aussi joué au rugby, j’étais très bon au jeu au pied… pour ressemeler dans les regroupements ! Bon, c’est vrai, après je lui ai dit dégage et je l’ai un peu bousculée. Je lui ai mis un petit « butas »…
Et son prochain conseil, il le fera à huis clos : « J’ai prévenu les gendarmes de Varilhes quand j’ai été convoqué pour la plainte de Mme Romher. Elle ne savait même pas mon nom. Ici tout le monde m’appelle « Miket ». Alors elle a porté plainte contre « Miket » ! Pas le Mickey de Disney. » Et Gérard Sabatier de tourner les talons pour regagner son domicile, en prévenant, espiègle : « Miket », en Algérie, c’était mon nom de guerre ! »
ladepeche.fr
Complément d’info : cette commune est composée de 34 habitants.