EDF condamné


La Cour de cassation a confirmé la condamnation de EDF.

L’électricien n’a pas fait assez pour empêcher la mortalité de faucons crécerellettes sur sept parcs éoliens.

C’est une victoire au goût amer pour l’association France Nature Environnement. Une victoire après dix ans de bataille de juridique et des dizaines de faucons crécerellettes retrouvés morts. EDF-Renouvelables a été condamné pour la destruction de ces oiseaux protégés dans l’Hérault « par collision avec les éoliennes des parcs du Causse d’Aumelas ». Elle doit verser 3 000 euros à FNE.

Concrètement, EDF-Renouvelables aurait bien dû déposer une demande de dérogation à la destruction d’espèces protégées pour ses trente-et-une éoliennes déployées sur le plateau. C’est ce qu’a conclu la cour de Cassation en rejetant ce 30 novembre le pourvoi de l’entreprise. Déjà condamnée en première instance et en appel, la société n’a jamais voulu se plier à cette démarche administrative — non obligatoire mais essentielle.

L’État de son côté, n’a jamais jugé prioritaire de contraindre EDF-R à des mesures coercitives pour limiter la mortalité des faucons crécerellettes. Le causse héraultais abrite pourtant une des plus importantes populations de cette espèce, qui a failli disparaître dans les années 1970. Assez rarement refusée, la demande de dérogation à la destruction d’espèces protégées (DEP) n’est même pas un document empêchant l’existence d’un parc éolien. Mais elle permet de limiter son fonctionnement sur certaines périodes (migration, période de chasse, reproduction, etc.). Le cas des éoliennes d’Aumelas désespère depuis longtemps associations et même services de l’administration. Ainsi, en 2020, la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) Occitanie avait produit un rapport interne demandant la suspension de l’exploitation des aérogénérateurs d’Aumelas en présence du faucon crécerellette. Cette espèce migratrice prend ses quartiers dans le midi de fin avril à la fin de l’été. Mais même là, l’État avait laissé les mains libres à l’entreprise. À Reporterre, cette dernière indique « prendre acte » de la décision de la cour de Cassation mais assure porter sur tous ses projets « une attention toute particulière à l’environnement et la biodiversité » en mettant en place « des mesures adaptées dès le début du projet et durant toute sa durée de vie ».

Un respect de la biodiversité laissé au bon vouloir des promoteurs

Le problème c’est que ces mesures ne suffisent pas. Même les dispositifs d’effarouchement (dits DT-Bird) censés éloigner les oiseaux qui voleraient trop près des pales des éoliennes d’Aumelas n’ont pas empêché un pic de mortalité de faucons crécerellettes mais aussi de busards cendrés durant l’été 2021.

D’où l’importance de ce jugement pour France Nature Environnement qui salue « une victoire » bien que tardive. « Avant même la construction de l’ensemble du parc, on avait déjà repéré des cadavres de faucons crécerellettes au pied des premiers mâts en 2010 », se souvient Simon Popy, président de FNE Languedoc-Roussillon. La décision de la cour de Cassation amène une preuve définitive des manquements de l’entreprise, et elle a « suffisamment de preuve pour aller désormais plus loin ». C’est-à-dire devant la justice pénale [1], qui pourrait condamner cette fois plus lourdement EDF-R pour chaque nouvelle mortalité constatée.

Des éoliennes dangereuses dans les zones de protection spéciale

Les éoliennes ne sont pas aussi dangereuses pour les oiseaux et les chauves-souris que les pesticides, les chats ou l’artificialisation. Mais elles s’ajoutent à ces menaces, et surtout elles deviennent très problématiques dans les zones de protection spéciale (ZPS) pour les oiseaux, comme à Aumelas, et les zones spéciales de conservation (ZSC) pour les chauves-souris.

C’est notamment pour réduire ces atteintes aux espèces protégées que le député EELV-Nupes de Gironde Nicolas Thierry a obtenu le vote — le 25 novembre dernier — d’un amendement au projet de loi d’accélération des renouvelables, visant à exclure les ZPS, les ZSC, les réserves et les parcs nationaux des « zones favorables » au déploiement des EnR futures.

Une nécessité attendue depuis des années par les associations environnementales. Reste que dans un communiqué publié ce vendredi 2 décembre, la Ligue pour la protection des oiseaux s’inquiète déjà que la future loi allège les normes environnementales sur toutes les autres zones naturelles. Le débat débutera dans l’hémicycle ce lundi 5 décembre.

Notes

[1] Pour le moment, l’électricien n’a été condamné que par un tribunal civil