Les commissaires enquêteurs taxés de partialité par les opposants au projet
L’association Vent Debout 59, opposant au projet d’éolien offshore au large de Dunkerque, se dit « écœurée » par l’avis favorable des commissaires enquêteurs suite à l’enquête publique au printemps. Avec 94,4 % d’expressions défavorables au projet, « il y a un manque de démocratie », dénonce-t-on.
L’instruction du projet du parc éolien au large de Dunkerque « se poursuit suite à l’avis favorable rendu par la commission d’enquête sur les demandes d’autorisation environnementale » après enquête publique au printemps, indique la préfecture du Nord.
En attendant, l’arrêté du préfet, l’association Vent Debout 59, opposant au projet, voit rouge. « On est écœurés de voir ainsi la volonté du public contournée », glisse Florent Caulier qui dénonce « un conflit d’intérêts des commissaires enquêteurs ».
« Manque de démocratie »
Contactée par « La Voix du Nord », la Compagnie nationale des commissaires enquêteurs (CNCE), se défend : « Ce n’est pas la première fois que des opposants à l’éolien, et même des élus, ont ce discours ». Si les commissaires enquêteurs sont indemnisés par le porteur du projet, « l’indemnité est fixée par le président du tribunal administratif et tout cela est consigné par le Code de l’environnement ». Le site du CNCE rappelle que pour chaque mission, « le commissaire enquêteur signe une déclaration sur l’honneur attestant qu’il n’a pas d’intérêt personnel susceptible de mettre en cause son impartialité ».
Vent Debout 59 va porter un recours au tribunal administratif « pour enquête non neutre ». L’enquête publique avait recueilli 2 882 contributions essentiellement locales (65 % sont des habitants du Nord) dont 94,4 % d’expressions défavorables. « Il y a un manque de démocratie sur ce type de projet, indique Florent Caulier. À quoi ça sert si c’est joué d’avance ? »
Le 17 décembre, les membres du conseil départemental de l’environnement, des risques sanitaires et technologiques (Coderst) rendaient eux aussi un avis favorable sur les demandes d’autorisation environnementale. Le ministère de la Transition écologique doit, lui, « prendre un arrêté sur les demandes d’utilité publique des lignes électriques », détaille-t-on à la préfecture.
La Voix du Nord
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Parc éolien au large de Dunkerque : nouvelle plainte, France « irrespectueuse », le torchon brûle avec la Belgique
L’avis favorable de la commission d’enquête au parc éolien au large de Dunkerque ravive les tensions entre la France et la Belgique. Si tous les recours belges ont été rejetés en France, la bataille est loin d’être terminée. Une nouvelle plainte a été déposée par le port d’Ostende.
Le port d’Ostende a déposé plainte contre le projet éolien au large de Dunkerque après l’avis favorable rendu par les commissaires enquêteurs suite à l’enquête publique au printemps.
Le projet de construction d’un parc de 46 éoliennes, – d’une capacité de 600 MW, qui sortiraient de mer au large de Dunkerque, en 2028 -, à seulement 11,4 km des côtes continue de cristalliser les tensions.
1. La bataille continue
Et l’avis favorable des commissaires enquêteurs rendu en fin d’année, – et à l’issue de l’enquête publique qui avait lieu au printemps dans le cadre d’une procédure d’autorisation environnementale –, semble avoir amplifié la discorde avec la Belgique, quand l’État belge y voit toujours « une atteinte à ses intérêts fondamentaux ».
La fronde belge face au projet éolien n’a pas été balayée malgré un renouvellement en 2024 de toutes les instances de pouvoir avec des élections législatives et régionales en juin et, provinciales et communales en octobre.
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En mai, avant des élections communales qui ont redessiné les conseils communaux, nous étions allés à la rencontre des maires des stations balnéaires de La Panne et Coxyde. Depuis, les édiles ont valsé mais pas la résistance contre ces éoliennes qui vont boucher l’horizon et pas que.
Loones Sander, maire de Coxyde, est « toujours parlementaire, souligne-t-il. Et c’est grâce à mon parti politique que le gouvernement fédéral avait entamé des actions juridiques contre le parc éolien. »
Le dossier du parc éolien est toujours sur la table. Et on va continuer à se battre dans le même sens. Loones Sander, Maire de Coxyde, étiqueté Niew-Vlaamse Alliantie (N-VA), parti de droite séparatiste
Son parti, le Niew-Vlaamse Alliantie (N-VA), parti de droite séparatiste, a gagné les élections fédérales. Et la Belgique est toujours en pleines négociations pour former un gouvernement : « Le dossier du parc éolien est toujours sur la table, confirme-t-il. Et on va continuer à se battre dans le même sens. » C’est-à-dire contre. « Et ce n’est pas qu’une histoire de villes côtières, mais une question de respect ! », estime Sander Loones.
2. La plainte en Belgique
Au port d’Ostende, ça fulmine. La direction ne reste pas impuissante face au projet porté par Éoliennes en mer de Dunkerque (EMD), – le consortium composé par EDF Renouvelables, maître d’ouvrage et de RTE, chargé du raccordement. Car le parc représente une menace directe pour la reprise du trafic transmanche entre Ostende et Douvres, interrompue depuis 2013. « Si le parc éolien se fait, notre projet est terminé », nous disait en mai Kevin Depuydt, commandant de port. Le port a déposé plainte devant le tribunal de la province de Flandre-Occidentale.
EMD nous dit avoir « appris l’action du port d’Ostende devant une juridiction belge, nous indique le consortium. La concertation fait partie intégrante du processus de développement du projet. Une enquête publique a eu lieu, à laquelle le port d’Ostende a participé. La demande d’autorisation est toujours en cours d’instruction par les autorités françaises compétentes. »
3. Des actions en justice en prévision
Du côté belge, on estime que la concertation n’est pas au rendez-vous autour de ce parc éolien qui alimentera les besoins industriels et servira à la consommation annuelle de près d’un million d’habitants. « Je comprends absolument que la France veuille plus de sûreté dans l’approvisionnement énergétique, j’aimerais que notre pays fasse pareil, admet Sander Loones. Mais je ne comprends pas que la France veut tout avoir, le nucléaire, l’éolien, mais d’une façon irrespectueuse. » Pour les Belges, qui demandent toujours le recul d’au moins 5 km du parc éolien, le projet a tout faux. Placé dans la zone protégée du réseau européen Natura 2000, il coupe aussi des routes maritimes aux Belges. Mais ces derniers ne semblent pas avoir été entendus.
Je ne comprends pas que les Français veulent tout avoir, le nucléaire, l’éolien, mais d’une façon irrespectueuse. Loones Sander
La décision du préfet, imminente, sera observée de près en Belgique. Si elle est positive, les Belges promettent de nouvelles actions en justice, quatre ans après le recours devant le tribunal administratif de Lille renvoyé devant le Conseil d’État, et rejeté dans les deux cas. « Nous aviserons des actions en justice en temps venu », promet Wim Janssens, le nouveau maire de La Panne.