Samedi 9 septembre, nous étions à Lanrivain en Bretagne, au manoir de Gollodic, pour une journée contre les éoliennes industrielles (témoignages, causeries, crêpes, fest-noz).
Les éoliennes, on n’y connaît pas grand-chose. Quoique GreenAlp, le distributeur d’électricité grenoblois, vante la part de l’éolien dans son « ambitieux programme » en matière d’énergies « renouvelables », l’Isère compte en tout et pour tout deux mâts de 60 mètres, à Pellafol. On est désolés pour les habitants de l’Oise, de la Somme ou des Pyrénées-Orientales, qui subissent des éoliennes censées fournir de l’« énergie propre » à la cuvette grenobloise, à des centaines de kilomètres de chez eux (cf. Rapport d’activité de GreenAlp, ici). Telle est la transition verte.
Il n’y a pas plus d’« énergie propre » que de société industrielle soutenable. La quête de puissance, multipliée par les moyens techno-industriels, détruit notre seule Terre. C’est, en substance, ce que nous avons dit aux amis bretons à propos de l’industrie éolienne. Nous avons rappelé l’article de 2012 paru dans la revue scientifique Nature, qui alertait sur le franchissement de seuils irréversibles pour notre biosphère, avec le risque de bascule imprévisible et brutale (lire ici). Les seuils en question concernent notamment l’effondrement de la biodiversité, les cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore, la mort des sols, l’acidification des océans, la pollution atmosphérique, le cycle de l’eau douce ou le bouleversement climatique.
Que s’est-il passé depuis cette publication ? Les technocrates internationaux ont joué le plus spectaculaire tour de passe-passe à des populations qui, apparemment, ne demandaient qu’à y croire. Ils ont réduit l’effondrement écologique au seul réchauffement climatique, donc aux émissions de gaz à effet de serre ; et ils ont réduit les gaz à effet de serre au seul carbone.
Avantage de la manipulation : la prétendue « solution technologique » de la décarbonation, ou transition énergétique. D’où les éoliennes industrielles, les centrales photovoltaïques, le nucléaire, l’hydrogène « vert » ou « blanc » – avec une mine annoncée en Bretagne – pour alimenter les appareils et les logements électriques, les véhicules électriques, les usines électriques, les villes électriques et les infrastructures cybernétiques de la smart planet. Au mépris de la destruction de notre milieu naturel, comme si nous allions désormais vivre d’électricité et de réalité virtuelle. Après tout, l’homme-machine n’a besoin que d’une bonne connexion.
Bref, la course panique à l’électrification totale.
A la peine de mort par électrocution.
D’après l’étude de 2012, la bascule des seuils d’équilibre de la biosphère devait se produire autour de 2025, si la croissance démographique et la consommation per capita se maintenaient à leurs niveaux d’alors (lire ici). Ce 13 septembre 2023, l’autre prestigieuse revue, Science, met à jour ces implacables prévisions. « Six des neuf limites planétaires sont franchies », dit l’article, et deux autres sont proches de l’être, « suggérant que la Terre est désormais hors de la zone de sécurité pour l’humanité » (voir là).
Sauf à réserver sa place dans un vaisseau d’Elon Musk en partance pour Mars (après fusion des glaces martiennes par expédition de bombes nucléaires), la conclusion devrait s’imposer à tout esprit capable de regarder la réalité en face : soit nous arrêtons tout, soit nous disparaissons. Mais il paraît que pour la lucidité, la plupart des humains ont également atteint leurs limites.